Texte : Banalité du bien - Matthieu Ricard

Un mendiant reçoit deux billets de 50 roupies
- somme relativement conséquente au Népal -
il en donne la moitié à son compagnon d'infortune.

Une infirmière épuisée
après une nuit de garde éprouvante
reste néanmoins quelques heures de plus
pour assister un mourant qui part seul.

Ma sœur, Ève, qui s'est occupée toute sa vie
d'enfants en difficulté,
n'a jamais hésité à se lever en pleine nuit
pour accueillir un enfant qui fuguait.

Dans le métro, un Maghrébin, percevant l'angoisse
d'une voyageuse qu'il ne reverra jamais,
lui murmure : "Ne t'inquiète pas, ma fille,
ça va passer."

Au terme d'une journée trop remplie,
un ingénieur rentre de son bureau
et fait 500 m de plus pour montrer
à un étranger perdu dans la capitale
le chemin de son hôtel.

On a pu parler de la "banalité du mal".
Mais l'on pourrait aussi parler
de la "banalité du bien" en se représentant
les mille et une expressions de solidarité,
de prévenance et d'engagement
en faveur du bien d'autrui
qui jalonnent nos vies quotidiennes
et exercent une influence considérable
sur la qualité de la vie sociale...

Le bien de tous les jours est anonyme ;
Il ne fait pas la une des médias
à la manière d'un attentat,
d'un crime crapuleux,
ou de la libido d'un homme politique.
S'il y a "banalité" c'est encore le signe
que nous sommes tous potentiellement capables
de faire du bien autour de nous.


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